Vainqueur de dix-huit tournois du Grand Chelem durant sa carrière, Jack Nicklaus reste, à ce jour, le plus grand golfeur de tous les temps.


Il fait partie de la légende du sport américain et mondial, au même titre que Mohammed Ali, Michael Jordan, Carl Lewis ou…Tiger Woods. Vainqueur de dix-huit tournois du Grand Chelem durant sa carrière, Jack Nicklaus possède, à ce jour, le plus beau palmarès de l’histoire du golf. Il remporta son premier Major à 22 ans lors de l’US Open et son dernier à 46 ans lors du Masters d’Augusta. Cette longévité exceptionnelle au plus haut niveau en dit long sur le caractère, la rigueur et le talent de ce champion du XXème siècle adulé par l’Amérique profonde et qui, aujourd’hui encore, suscite l’admiration partout où il passe.

 

A la lumière des phares de voiture

Jack Nicklaus est né le 21 janvier 1940 à Columbus, dans l’Ohio, au cœur de ce Midwest qui sent bon l’Amérique profonde. Issu d’une famille aisée, il connut une enfance heureuse aux côtés de ses parents Helen et Charlie et de sa petite sœur Marilyn. « C’était un petit garçon fougueux, enthousiaste et plein de répartie » se souviennent ses amis de l’époque.

Passionné de sports, le petit Jack pratiquait, pêle-mêle, le base-ball, le football et le basket avec le même bonheur. Il accompagnait aussi souvent son père à la pêche ou à la chasse. « Papa était un modèle et un ami. Je passais beaucoup de temps en sa compagnie. Il m’apprenait mille et une choses, me donnait plein de bons conseils… »

C’est Charlie Nicklaus qui fit d’ailleurs découvrir le golf à son fils. « Papa s’était blessé à la cheville en jouant au volley. Il avait donc repris, sans grande conviction, le chemin des fairways. Voyant que j’étais intéressé et que je me débrouillais pas mal, il me demanda si je voulais apprendre à jouer… »

Jack avait dix ans. Il ne se doutait pas que son destin venait brusquement de changer.

Il fit ses débuts au Scioto Country Club. Sa passion était dévorante. « Mon père s’étonnait même des factures qu’il recevait pour les seaux de balles. J’en vidais il est vrai dix à quinze par jours » se souvient-il, amusé.

Au vrai, l’enfant prodige s’entraînait du matin au soir, parfois même à la lumière des phares de la voiture de son père. « Dans les autres sports, comme le baseball ou le foot, on dépend toujours des autres. Là, j’étais libre d’organiser mon temps comme je voulais et d’assouvir à fond ma passion… »

Doué, le jeune Nicklaus attira vite le regard de Jack Grout, l’un des pros du club qui le prit sous son aile et l’entraîna de façon beaucoup plus pointue. « Je lui dois tout. Il m’a enseigné la simplicité du jeu, les bonnes tactiques. Il m’a fait aimer le golf… »

Sans abandonner la pratique d’autres disciplines et en poursuivant bien sûr ses études, Jack Nicklaus brûla les étapes golfiques au soleil de son talent, collectionnant les succès dans toutes les catégories d’âge et trustant les titres dans les championnats amateurs…

Le sacre d’Oakmont

C’est en 1960, à l’âge de vingt ans, que Jack Nicklaus se révéla  lors de l’US Open de Cherry Hills. Surpris, le public découvrit la tignasse blonde et le physique plutôt balourd de ce jeune homme sans complexe qui s’offrait le luxe de titiller un certain Arnold Palmer, héros de tout un peuple.

A l’époque,  Palmer était l’indiscutable numéro un mondial et remportait la plupart des tournois auxquels il participait. Imaginez dès lors la tête des Américains en voyant ce jeune Nicklaus, encore amateur, venir contester la suprématie du dieu du swing ! In fine, Palmer remporta cet US Open avec deux petits coups d’avance mais en levant la coupe il devinait que rien ne serait plus pareil avec l’arrivée de grand blond…

« En ce temps-là, le golf ne rapportait pas les mêmes sommes qu’aujourd’hui. »

De fait, deux ans plus tard, sur le parcours de Oakmont, Jack Nicklaus savoura une magnifique revanche, remportant son premier US Open au terme d’un somptueux playoff face à ce même Arnold Palmer. « Le public avait pris fait et cause pour Palmer. Malgré l’animosité générale et même quelques injures, Nicklaus conserva tout son calme et s’adjugea le tournoi en vrai champion expérimenté » racontaient les chroniques de l’époque.

Jack était lancé. La machine à gagner était sur les rails. « Curieusement, je n’étais pourtant pas très chaud à l’idée de passer professionnel. En ce temps-là, le golf ne rapportait pas les mêmes sommes qu’aujourd’hui. Je me serais bien vu  assureur » ironise-t-il.

Mais, là, plus question d’enclencher la marche arrière. Elevé au rang de nouvelle star, Jack doit assumer son nouveau statut. Face au déchaînement médiatique, il peut compter heureusement sur l’aide de ses parents et de sa femme Barbara qu’il a épousé dès l’âge de vingt ans. « On s’est rencontré sur les bancs de l’Université. Le coup de foudre fut immédiat… » se souvient-il.

Barbara se plaît à raconter leur curieux voyage de noces. « J’avais demandé à Jack d’aller à New York. Sur la route, il a fait trois haltes pour découvrir de nouveaux parcours. Finalement, au lieu de quinze jours, le voyage a duré une petite semaine avec quatre séances de golf au menu. Et c’est à peine si j’ai visité Manhattan… »

Barbara joua un rôle essentiel durant toute la carrière de son mari. Toujours présente, attentive, elle fut de bon conseil et une parfaite maman pour ses cinq enfants. « Malgré sa carrière qui lui prenait beaucoup de temps, Jack fut un papa modèle. Il ne partait jamais plus de quinze jours et n’hésitait pas à louer un avion privé pour revenir à la maison durant un tournoi pour fêter un anniversaire. Il s’occupait beaucoup de ses enfants, comme son père s’était beaucoup occupé de lui » résume Barbara. Ce n’est pas un hasard, au demeurant, si deux des enfants Nicklaus – Gary, Steve et Jack Junior – cédèrent, eux aussi, à la tentation et devinrent professionnels de golf…

Dix-huit Majors

Il faudrait un livre pour narrer tous les succès de Jack Nicklaus. Après dix ans de carrière, il avait déjà égalé le record de victoires en Majors (14) de son modèle, Bobby Jones. Au total, il remporta 18 titres du Grand Chelem : 4 US Open (1962, 1967, 1972, 1980), 3 British Open (1966, 1970, 1978), 5 USPGA (1963, 1971, 1973, 1975, 1980) et 6 Masters (1963, 1965, 1966, 1972, 1975 et 1986). A ce jour personne n’a évidemment fait mieux.

Au cours de sa carrière, Nicklaus croisa sur son chemin des adversaires de très haut niveau et livra des batailles fantastiques face à Arnold Palmer, Lee Trevino, Gary Player ou Tom Watson. Il en perdit certaines, il en remporta beaucoup. « Dans l’absolu, il nous a toujours dominé. Il avait une force de concentration incroyable qui lui permettait de se tirer de toutes les situations. Il disséquait les parcours comme personne, avec une rare facilité. Et, dans les moments décisifs, il ne ratait pas un putt » explique Lee Trevino.

« J’ai toujours considéré que les putts de deux ou trois mètres étaient une forme de récompense des beaux coups joués sur le fairway. Cela m’enlevait beaucoup de pression à l’heure de les rentrer… » sourit l’intéressé.

La victoire de Jack Nicklaus au Masters de 1986 fut sans doute sa plus belle, car la plus inattendue. Nul n’imaginait qu’à 46 ans, six ans après son dernier grand titre, il serait encore capable de gagner sur les greens d’Augusta. C’était mal connaître le champion qui, en état de grâce, sortit son plus bel arsenal de…vétéran pour battre d’un « stroke » Greg Norman et Tom Kite, ses premiers poursuivants. Du jamais vu. Le lendemain de ce couronnement inespéré, Jack Nicklaus vendit 500.000 putters à son nom aux Etats-Unis et relança complètement sa carrière et ses affaires!

 

Un véritable empire

Nicklaus a mis un terme à sa carrière à 65 ans lors du British Open 2005 qui se disputait sur le Old Course de St.Andrews, berceau du golf et où il s’adjugea deux de ses British Open. Au total, il a remporté 113 victoires professionnelles, dont 55 sur le PGA Tour. Il participé, comme joueur, à six Ryder Cup et fut deux fois élevé au rang de capitaine de l’équipe américaine. Les chroniqueurs n’ont pas oublié ce putt d’un bon mètre qu’il donna à son adversaire Tony Jacklin lors de l’édition de 1969 au Royal Birkdale et qui permit à la Grande-Bretagne d’arracher sur le fil l’égalité. « Tony ne méritait pas de rater ce putt devant son public » confia Nicklaus, exemple de fairplay.

Si détesté à ses débuts en raison de son opposition à Arnold Palmer, Jack Nicklaus est, au fil des ans, devenu un véritable héros aux Etats-Unis où son nom est invariablement associé au golf. Durant sa carrière, Nicklaus ne s’est pas contenté, il est vrai, de jouer. Il s’est transformé en patron de société et en chantre du golf business, donnant son nom à du matériel de golf, à des Académies, participant à des campagnes de publicité et dessinant de nombreux parcours. « Il a toujours eu le sens des affaires et n’a pas hésité, le cas échéant, à prendre des risques financiers pour relever les défis qu’il s’était fixé… » disent ses proches.

Fallait-il qu’il ait les reins solides pour décider, à l’âge de 26 ans, de construire un parcours à Columbus, sa ville natale. Soucieux du moindre détail, Nicklaus surveilla personnellement tous les travaux et signa un dix-huit trous de rêve qui accueille chaque année le prestigieux Memorial Tournament, l’un des plus renommés du circuit américain.

Grâce à sa société « Nicklaus Design », plus de 300 parcours dans le monde portent aujourd’hui sa griffe. A la tête d’un véritable empire et d’une colossale fortune, Jack Nicklaus porte, mieux que quiconque, son surnom de « Golden Bear » (« Ours doré ») donné un jour par un journaliste australien. Aujourd’hui, à 79 ans, il  peut, en tout cas, regarder avec fierté son plus beau parcours : le sien. 

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