Disparu à l’âge de 90 ans, Sean Connery était un fervent amateur de la petite balle blanche. Portrait atypique de cette icône du cinéma, James Bond éternel, qui alliait élégance et virilité.


L’homme, avec cette discrétion qui le caractérisait, s’est éteint paisiblement dans son sommeil, dans sa résidence des Bahamas, en cette soirée d’Halloween. A 90 ans.

« Mes pensées vont à sa famille et à ses proches. Où qu’il puisse être, j’espère qu’il y a un parcours de golf. » Cette petite phrase, glissée par Daniel Craig, dernier héritier en date du smoking de James Bond, en hommage au regretté Sean Connery, en dit long sur la passion que vouait l’acteur écossais pour la petite balle alvéolée.

C’est pourtant le football que ce beau jeune homme, sportif accompli, pratiquant assidûment la boxe et la musculation, avait failli préférer à la comédie. Ailier au Bonnyrigg Rose Athletic Club, il est, en effet, repéré par les recruteurs de Manchester United lors d’un match amical qu’il avait organisé à l’occasion du passage de la comédie musicale « South Pacific », dans laquelle il tient un rôle de hallebardier.

« A 30 ans, un joueur de football a sa carrière derrière lui »

Mais du haut de ses 23 ans, Sean Connery refuse l’offre des Red Devils. « Je voulais vraiment accepter car j’aime le football », confiera-t-il, plus tard, à Alex Ferguson, devenu le manager emblématique des Red Devils. « Mais j’ai compris qu’un footballeur professionnel pouvait avoir son passé derrière lui à l’âge de 30 ans. Or tous les acteurs connus de l’époque, comme Burt Lancaster ou Clark Gable, avaient tous plus de 30 ans… Donc j’ai décidé de devenir acteur, ce qui s’est avéré être une des décisions les plus intelligentes que j’aie jamais prises. » 

Car le succès est vite au rendez-vous. En 1961, il est enrôlé par une production au budget restreint pour le tout premier « James Bond 007 contre Dr No » (1962) inspiré des écrits d’Ian Fleming. Au nez et à la barbe des David Niven, Cary Grant ou autres James Mason, le jeune Ecossais aux prétentions financières moins astronomiques se fond parfaitement dans le personnage. Elégance, charme, charisme et virilité lui ouvrent toutes grandes les portes d’un succès planétaire. Au service de Sa Majesté et au volant de son Aston Martin, Sean Connery grave dans la pierre le mythe de l’agent secret. « Bons Baisers de Russie » (1963), « Goldfinger » (1964), « Opération Tonnerre » (1965), « On ne vit que deux fois » (1967), « Les diamants sont éternels » (1971) et le non officiel « Jamais plus jamais » (1983) font de l’acteur britannique un véritable héros des temps modernes.

Né en 1930 dans les rues froides et sombres d’Edimbourg, Sean Connery a grandi à l’ombre du mur bordant les 14 ha du parcours de golf de Bruntsfield Links, le quatrième plus ancien club au monde. Ce n’est pourtant qu’à 34 ans, lors du tournage de « Goldfinger » dans les studios de Pinewood (banlieue de Londres) et pour les besoins du scénario, qu’il s’essayera à la maîtrise du swing. James Bond y remporte un match-play épique contre le méchant héros du troisième épisode des aventures de James Bond adapté au cinéma. Sur le parcours de Stoke Park, Bond propose une partie avec pour enjeu un lingot d’or nazi. Comble de l’ironie pour le passionné de golf qu’il est, il gagne la partie en… substituant la balle de son adversaire, qui est alors suspecté de triche.

« Si vous trichez au golf, vous êtes le perdant… »

« Et j’ai tout de suite été accro ! » avoue-t-il dans son autobiographie « Being a Scot », parue en 2009. « Bien vite, ce sport a pris presque le dessus sur ma vie. En fait, j’ai commencé à voir le golf comme une métaphore de l’existence. Sur un parcours, vous êtes essentiellement seul, en compétition contre vous-même. C’est une école de patience et d’humilité où les vérités d’un jour ne sont pas celles du lendemain. Et si vous trichez, vous serez le perdant car vous trompez votre seule personne… » 

Passionné, il convainc quelques associés d’acheter avec lui un château à Tourrettes, dans l’arrière-pays varois. L’idée est de créer un parcours de golf sur les 233 ha du domaine. Mais les investisseurs ne suivent pas et cassent le rêve de Sean Connery. Le projet renaîtra de ses cendres un peu plus tard sous le nom de Terre Blanche, devenu aujourd’hui l’un des plus beaux resorts de golf d’Europe.

007 se consolera en jouant sur les plus beaux parcours du monde au gré de ses humeurs et de ses voyages. Membre à St.Andrews, on l’a vu chasser les birdies du côté de Marbella et des Bahamas, où il avait aussi pignon sur green.

Sean Connery le sait, l’image de Bond lui colle à la peau. Un peu trop, peut-être. C’est pourquoi il diversifie ses rôles mais ni « Le Crime de l’Orient-Express » (1974), ni même « Un pont trop loin » (1977) n’arrivent à le décrotter complètement de son image « Jamesbondienne ». Il cède donc le rôle à Roger Moore et, après un léger passage à vide, relance sa carrière de manière remarquable. En témoignent le BAFTA du meilleur acteur pour son interprétation du moine Guillaume de Baskerville dans « Le Nom de la rose » (1986), son Oscar et son Golden Globe du meilleur second rôle pour sa performance dans « Les Incorruptibles » (1987), « Highlander » (1986), « Indiana Jones » et « La Dernière Croisade » (1989) mais aussi « A la rencontre de Forester » (2000), où il campe un philosophe reclus prenant sous son aile un jeune prodige du basket-ball…

Anobli par la reine Elisabeth pour service rendu au cinéma britannique et membre de l’Ordre de l’Empire, Sean Connery se retire des écrans en 2003 pour n’apparaître qu’épisodiquement lors de commémorations ou d’événements sportifs. Son ultime rêve aurait été d’effectuer un tout dernier film avec son ami Clint Eastwood, autre passionné de golf avec qui il jouait régulièrement. Le sujet ? Les frustrations du golfeur moyen avant de les transformer en expérience mystique…

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