Fauché en pleine gloire, en 1955, à l’âge de 24 ans, dans un accident de la route au volant de sa Porsche 550 Spyder argentée, James Dean incarnait la jeunesse américaine rebelle à l’approche des sixties. Mi-ange, mi-démon, l’acteur a été élevé au rang de mythe.


Nous sommes en 1955. James Dean sort du tournage du film « A l’Est d’Eden » quand il se met à la recherche de la voiture de ses rêves. Les premières Porsche 550 Spyder viennent de franchir l’Atlantique. James Dean signe le bon de commande. Il faut dire que le modèle est une véritable révolution en matière de ligne et de performances. Entre le jeune acteur et le bolide argenté, c’est le coup de foudre immédiat. A tel point que le jour de la livraison, la petite amie de l’acteur — Ursula Andress — refuse de monter à bord. Lui préfère en plaisanter, évoquant une rivalité féminine. Son ami et acteur Alec Guinness ressent un fort pressentiment en découvrant la voiture et tente de dissuader James de l’acheter.  Il le prévient : « Si tu te sers de cette Porsche, tu seras mort dans quelques jours. »

Rien n’y fait et James Dean ne se laisse pas impressionner par ces mises en garde. Il confie à son ami Georges Barris la préparation de la carrosserie. Celui-ci frappe le numéro 130 sur le nez et les portières et inscrit sur le coffre « Little Bastard », surnom choisi par la star pour son bolide allemand. Au moment de lui rendre la bête décorée, il lui fait aussi part de son sentiment étrange concernant ce véhicule.

« Si tu te sers de cette Porsche, tu seras mort dans quelques jours… »

Nous sommes le 30 septembre 1955. James Dean est impatient. Il veut participer à une compétition automobile au nord de la Californie. Il quitte Los Angeles à l’aube au volant de sa Porsche 550 Spyder repérée quelques mois plus tôt dans un garage de la région. Connaissant le penchant du jeune acteur pour les courses automobiles, George Stevens, le réalisateur qui vient de lui faire tourner son 3e long-métrage (« Géant »), lui avait interdit de prendre part à toute compétition durant le tournage.

Accompagné de son mécanicien et ami Rolf Wutherich, James Dean se met en route ce jour-là comme un étudiant ayant terminé ses examens. En direction de Salinas, il se fait intercepter par la police et se voit infliger une amende pour excès de vitesse. C’est à peine quelques instants plus tard, alors qu’il roule déjà depuis plus de quatre heures, qu’à un croisement sur la route 466, un étudiant, Donald Turnupseed, à bord de sa Ford Sedan, coupe la route de la Porsche lancée à 90km/h. Les deux voitures se percutent de plein fouet. Rolf Wutherich heurte le tableau de bord avant d’être projeté hors du véhicule. James Dean, lui, est tué sur le coup, tandis que l’étudiant s’en sort avec quelques hématomes en répétant, hébété : « Je ne l’ai pas vu, je ne l’ai pas vu… » Le décès de l’acteur est annoncé peu avant 18h… et plonge la jeunesse américaine éprise de liberté dans un profond désarroi.

 

Quelques mois plus tard, lors de la cérémonie des oscars, James Dean est l’un des cinq acteurs nommés dans la catégorie du meilleur acteur. Il est d’ailleurs aussi le seul à avoir été nommé deux fois à titre posthume…

Une histoire dramatique

James Byron Dean est né à Marion, dans l’Indiana, le 8 février 1931, de Winton et Mildred Dean. Son passe-temps favori consiste à improviser des pièces de théâtre avec sa mère à l’aide de figurines et d’une scène miniature. Lorsque sa maman décède d’un cancer, il n’a que 9 ans. Elle l’a toujours poussé vers le haut. Ado, il se jette à corps perdu dans des rôles et des interprétations hantées, presque animales, que ce soit dans des associations caritatives ou au lycée. 

Un peu plus tard, il part à New York et à Los Angeles à la recherche de rôles au cinéma. Le mythe est tout près de naître. « Pourtant, il ne possédait à peu près aucun des canons de l’époque. Il était mal fichu, un peu voûté. Ses cheveux, c’était n’importe quoi. Sauf qu’il dégageait une énergie que je qualifierais de sexuelle. » C’est Tennessee Williams qui parle ainsi du jeune blond dont il a fait connaissance alors qu’on lui avait chanté ses louanges.

La vie personnelle de James, alias « Jimmy », Dean n’est, en revanche, pas très heureuse. La seule histoire d’amour passionnelle qu’on lui connaisse est celle qu’il vécut avec une autre étoile, Pier Angeli. Elle est brève et se termine mal. La belle Italienne le quitte sous la pression de ses parents pour en épouser un autre, quelques mois plus tard. La blessure sera profonde pour le jeune homme, à nouveau abandonné. Des femmes, il attend qu’elles soient des mentors. Il entretient ainsi une relation intellectuelle très particulière et forte avec Liz Taylor.

A sa mort, il partageait la vie de la jeune actrice d’origine suisse Ursula Andress, nymphe blonde, fraîchement débarquée du Vieux Continent et des studios transalpins de la Cinecitta. Avant, il avait vécu une courte histoire tumultueuse avec l’actrice de films d’horreur et adepte de la magie noire Maila Nurmi, nièce du fameux marathonien finlandais Paavo Nurmi. Elle sera aussi l’une des premières à révéler la bisexualité de James Dean aux journalistes.

Des hommes qui ont traversé la vie de l’acteur, il y en a eu, même si tout a été fait à l’époque pour gommer ces histoires. N’oublions pas que dans les années 50, l’homophobie est réelle.

Personnage atypique et à fleur de peau, James Dean était-il vraiment doué pour… le bonheur ? On ne le saura jamais, faute de temps. Mais, sincèrement, on se permet d’en douter.

La malédiction de « Little Bastard »

Est-ce le mauvais sort qu’aurait jeté Maila Nurmi à James Dean et à ses amis acteurs de « La Fureur de Vivre » ? Toujours est-il que tout ce petit monde mourra jeune et de façon violente.  Après James Dean, Nathalie Wood meurt noyée à 43 ans dans des circonstances jamais élucidées; Sal Mineo décède poignardé à 37 ans et Nick Adams succombe d’une overdose à 36 printemps.

La légendaire Porsche défraya aussi toutes les chroniques. Récupérée par Georges Barris, son préparateur, après l’accident mortel, son épave est embarquée sur un camion et au moment du déchargement, elle glisse de la rampe et écrase le malheureux chauffeur, tué sur le coup. C’est le deuxième mort en quelques jours autour de ce véhicule. Et c’est malheureusement le début d’une longue série.

Deux médecins rachètent le moteur et la transmission quelques semaines plus tard en vue d’une course. Le premier restera paralysé, le second succombera sur le coup lorsque sa voiture percute un arbre.

Même malédiction pour un jeune fan de James Dean ayant racheté deux pneus de la Porsche. Lors de sa première sortie, les gommes explosent simultanément et le jeune homme s’en sort de toute justesse. Finie donc la revente des pièces…

Prêtée à la police des autoroutes de Californie afin de sensibiliser le public aux dangers de la route, la Porsche est remisée dans un showroom qui est ravagé par un violent incendie. Toutes le voitures sont calcinées… sauf l’épave !

En se rendant à la première exposition devant se tenir dans une école secondaire, la voiture tractée par un camion se détache et provoque un nouvel accident mortel. Un an après le décès de l’acteur, elle se retrouve suspendue en l’air lors d’une kermesse locale. Mais trois boulons cèdent simultanément ! Le véhicule tombe au sol, écrasant les jambes d’un adolescent de 15 ans. Quelques semaines plus tard, toujours sur la route 466 menant à Salinas, le camion qui transporte le bolide subit un grave accident. Indemne, le chauffeur s’enquiert de son chargement, lorsque la voiture bascule du plateau et écrase le pauvre homme…

C’en est trop pour Georges Barris qui décide d’envoyer l’épave à la casse. Pourtant, à son arrivée en Californie, le conteneur sécurisé par des plombs s’avère vide… Plus personne n’entendra parler de « Little Bastard » jusqu’en 2005, et ce témoignage un peu inattendu d’un quadragénaire de l’Etat de Washington se rappelant s’être coupé la main, à l’âge de 6 ans, lorsqu’il aida son père et deux amis à emmurer le véhicule dans un bâtiment toujours existant. Il faut dire que le Volo Museum offre depuis plusieurs années une récompense d’un million de dollars à celui qui retrouverait la fameuse épave…

Members Only partner, editorial coordination and reporter

Comments are closed.